Ce vendredi 22 janvier, le Cercle Bourguignon recevait à Lille Jean-Yves Le Gallou pour la sortie de son dernier ouvrage : « Européen d’abord, essai sur la préférence de civilisation ». « Européen d’abord », c’est avant tout un vibrant hommage à notre civilisation et un plaidoyer de l’absolue nécessité de l’idée européenne pour assurer notre souveraineté, à nous Français ainsi qu’à tous les autres Européens. Car comme le rappelle Jean-Yves Le Gallou, tous les vrais problèmes auxquels nous sommes aujourd’hui confrontés ont une dimension européenne. Démographie, immigration, prédation des multinationales, agression des lobbys mondialistes, compétition avec les Etats-Unis, la Chine et demain l’Inde ou la Russie… Tous ces problèmes frappent les Européens dans leur ensemble et ne pourront trouver de solution que par une réponse de dimension européenne également. Dès lors, il convient de balayer immédiatement l’idée entretenue par les technocrates bruxellois comme les souverainistes nostalgiques : l’Union Européenne, ce n’est pas l’Europe. Elle en est à bien des égards la négation même. Alors, avant d’aller plus loin, Jean-Yves Le Gallou pose cette question à son auditoire : « Comment en est-on arrivé là ? ». Comment l’Europe, autrefois si puissante et souveraine a-t-elle pu ainsi chuter de son piédestal, se mettant à la merci des puissances étrangères, incapable qu’elle est de sortir des antagonismes nationaux qui la minent aujourd’hui ? Le processus fut graduel mais continu. Depuis 1914, l’Europe a subit une série d’attaques conjuguées qui ont abouti à l’anti-Europe dans laquelle nous vivons aujourd’hui. Après deux guerres mondiales, l’Europe a perdu sa prédominance dans les affaires du monde, se questionnant sur sa nature, doutant d’elle-même pour la première fois depuis longtemps. En tout cas, jamais autant qu’autrefois. Nos dirigeants, nos élites, par calcul, par trahison ou tout simplement parce qu’ils étaient dans l’air du temps procédèrent à une véritable entreprise de négation de ce que nous sommes. Dans un double mouvement de déconstruction et de culpabilisation, les Européens devinrent oublieux de ce qu’ils furent, les rares souvenirs leur restant ne devant plus leur évoquer que honte et reniement. Pour expier, les Européens devaient se fondre dans le grand mouvement de négation initié par les élites mondialistes et destiné à façonner le parfait consommateur, le dernier homme nietzschéen. Négation des identités, négation des genres, négation des espèces même avec le mouvement antispéciste aujourd’hui… seule l’identité qui s’achète, qui se vend, dont l’on peut changer indéfiniment et que chacun peut choisir selon son bon plaisir est devenue acceptable. Mais toute identité a par définition les critères inverses. Les identités s’héritent, et lorsqu’elles évoluent, c’est lentement, sur plusieurs générations et dans les limites du raisonnable. Jean-Yves Le Gallou insiste sur ce point, c’est la discrimination, soit la faculté de faire la distinction entre le semblable et le différent qui permet de définir des identités. Il est d’ailleurs bien peu étonnant que le seul critère de discrimination accepté aujourd’hui soit… l’argent. Mais la nature a horreur du vide. Un monde ne saurait être peuplé de gens sans véritable identité. Ce vide en Europe, d’autres le combleront si nous n’y prenons pas garde. La civilisation islamique, qui se refuse à subir toute entreprise de négation identitaire, en profitera par le biais de sa diaspora si nous ne nous défendons pas. A notre grand effacement succédera alors le grand remplacement. Et chacun de nous en sera responsable. Nous ne pouvons toujours en rejeter la faute sur des élites corrompus. Alors pour convaincre ceux des nôtres qui s’enferment dans le déni, Jean-Yves Le Gallou livre les données, les faits suivants : Faute de statistiques ethniques interdites en France (sauf pour souligner le racisme de sa population de souche évidemment), on peut toujours obtenir des informations sur le sujet. A la télé, le CSA regrettait que les programmes de 2016 ne représentaient alors que 16% de « non-blancs ». On en déduit que ces derniers représentent bien 20%, si ce n’est plus, de la population française. On peut également se pencher sur le dépistage de la drépanocytose chez les nouveau-nés. Ce dépistage, pour des raisons épidémiologiques, n’est réalisé que sur les bébés dont les deux parents sont d’origine extra-européenne. En 2018, 40% des nouveau-nés se faisaient dépister, 70% en Ile-de-France… Mais si nous voulons nous relever, il convient de combattre ce qui nous fit chuter. Au grand effacement nous devrons donc opposer un grand ressourcement. Et ce grand ressourcement passera par l’affirmation de ce que nous sommes collectivement, civilisationnellement: des Européens. Alors qu’est-ce qu’être Européen ? Tout d’abord, c’est une civilisation des libertés. Que ce soit par l’exemple de la démocratie athénienne, par la libertas si chère aux Romains, par la liberté de penser qui s’installa progressivement au Moyen-Age… en Europe ne peut être vrai que ce qui peut être librement contesté. L’Européen est un être libre car usant de sa raison. L’Europe, c’est également une civilisation de l’incarnation, de la représentation du divin. Que ce soit par les statuaires des Grecs et des Romains qui représentaient leurs Dieux sous des traits humains ou par la représentation de Jésus-Christ (acquis européen sur la tradition hébraïque) plus tard, en Europe le divin et l’humain vont esthétiquement de pair. L’Europe, c’est également une civilisation qui voit du divin dans la nature. Des peintures rupestres représentant le monde animal à Saint-François d’Assise, des traditions antiques au travail des jardins du Moyen-Age, en Europe domine le sentiment que notre terre est sacrée. L’Europe, c’est aussi une civilisation qui a donné à la femme une position qu’elle n’eût nulle part ailleurs. Omniprésente dans les arts, ayant eu un rôle important chez les Celtes et les Germains, que ce soit par le nombre important de ses saintes ou de ses déesses comme au travers de l’amour courtois, la femme est honorée en Europe. L’Europe, ce fut de tout temps l’équilibre entre les fonctions de souveraineté, les fonctions guerrières et les fonctions productives. Force est de constater que l’Europe va mal depuis que la fonction productive, par le biais de la haute-bourgeoisie, s’est accaparée tous les pouvoirs. Et cela n’est que logique. Qu’espérer d’une vision du monde purement économique ? L’Européen ne peut s’épanouir que si son horizon mélange sacré, adversité et prospérité. Cet univers mental européen, porté par ses peuples constitutifs, dessine un récit civilisationnel qu’il nous faut nous réapproprier et que Jean-Yves Le Gallou redessinera pour son auditoire ce soir-là. Dans toute l’Europe se répandirent en effet les sépultures celtiques, les bâtiments romains, les églises romanes, le gothique et le baroque, la Renaissance puis l’Art nouveau. C’est ce monde-là qu’il nous faut rejoindre et perpétuer. Quel sera son prochain mouvement ? Nous l’ignorons encore mais il n’appartient qu’à nous de le créer. Pour prendre conscience de notre européanité, le recours à notre histoire guerrière est lui aussi important. En effet, si nous nous sommes souvent battus entre Européens, nous avons également beaucoup guerroyé contre l’extérieur. Que ce soit Rome face à Carthage, les Grecs face à la Perse ou la Chrétienté face à l’Islam, notre conscience d’être des Européens fut également déterminée par les appétits des autres peuples à notre égard. Ainsi, et pour conclure, qu’est-ce que la préférence de civilisation pour Jean-Yves Le Gallou ? – C’est avoir conscience que ce récit civilisationnel et cet avenir commun ne veut pas dire abandonner nos particularismes nationaux et régionaux. – Ne plus tout mettre sur le même plan. Il est inconcevable d’accorder le même statut à l’Islam qu’au Christianisme, présent en Europe depuis 1500 ans. – Affirmer que certains mœurs, certaines traditions sont résolument incompatibles avec les nôtres et en tirer les conséquences, sauf à en payer le prix de la lâcheté. – Réussir à transmettre notre héritage tout en s’adaptant à notre époque. Ce, sans travestir ni trahir. – Réhabiliter les rites accompagnant les moments cruciaux de l’existence : naissance, mariage, mort. – Ne plus raisonner uniquement en termes de droits individuels. Il faut affirmer des droits collectifs, en particulier celui des Européens à perdurer sur la terre de leurs ancêtres. A tous ceux qui le comprennent ou qui sont prêts à l’entendre, Jean-Yves Le Gallou donne deux rendez-vous : celui des élections européennes de mai 2019 qui verra peut-être enfin naître un bloc politique défini sur cette ligne. Et celui de l’Institut Iliade pour son prochain colloque du 6 avril prochain à Paris et intitulé « Europe : l’heure des frontières ». Plus que jamais, c’est l’heure des Européens et de l’Europe.